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Les 4 attitudes du manager, de l’apathique à l’empathique !

 

 

 

Pour bien mener ses communications interpersonnelles il est souvent recommandé d’adopter une attitude empathique devant l’autre. Mais, qu’est-ce que cela signifie ? Comment décortiquer cette attitude prescrite pour développer des relations saines ?

Pourquoi est-il si important pour un manager de s’assurer que leurs collaborateurs se sentent entendus, compris et soutenus dans leur développement ?

 

Les 3 filtres perceptifs

Imaginez-vous, en plein marathon de réunions, traversant les couloirs de votre entreprise, l’esprit tournant à mille à l’heure et, zigzagant entre les différents dossiers en cours,  vous apercevez à la machine à café un collègue qui vous fait signe de le rejoindre. Pas de bol, vous auriez bien aimé savoir comment s’est déroulé son déménagement mais, par manque de temps, vous lui faites un petit signe rapide en pointant du doigt votre horloge. Il a compris le message, la petite parlote n’est pas dans vos priorités du jour…

 

Que vient-il de se dérouler dans votre esprit? Consciemment ou non, vous avez adoptez une attitude d’indisponibilité qui vous a préparé à décliner l’invitation de votre collègue. Cette attitude en question s’est construite grâce à plusieurs filtres perceptifs de votre cerveau :

  1. Le filtre cognitif vous a fait mobiliser les informations sur vos connaissances de la situation (manque de temps, priorités à respecter, statut de la relation avec votre collègue, etc.)
  2. Le filtre affectif vous a fait mobiliser l’ensemble des émotions ressenties devant la situation (regret, frustration, sympathie pour votre collègue, etc.)
  1. Le filtre comportemental vous a informé quant à votre intention d’action devant la situation (se montrer indisponible en justifiant le refus)

 

Bien sûr, nos connaissances, nos valeurs et nos états émotionnels sont bien des constructions issues de nos aventures de vie personnelles et cet exemple aurait pu se conclure de mille autres façons en fonction des filtres perceptifs de chacun.  Il illustre néanmoins le processus de création d’une attitude (toujours dépendante d’un contexte) qui a pour objectif de préparer les individus à appréhender la réalité.

 

 

Communiquer c’est agir

Même si les attitudes peuvent devenir des automatismes, comme lorsque nous achetons systématiquement la même marque de savon, l’être humain passe systématiquement à travers  un processus de création d’une attitude avant d’agir. Et, comme toute action de communication est un moyen d’agir et de modifier le comportement de l’autre, il est logique que l’attituded’une personne qui communique influence la forme et le contenu de son message.

 

Du style apathique au style empathique

Dans cette perspective, il est intéressant de lister les différentes positions que peut adopter un managerdevant des feedbacksde collaborateurs. En déchiffrant les mécanismes de quatre attitudes[1] (« apathique », « antipathique », « sympathique » et « empathique »), nous vous proposons de réfléchir sur l’efficacité de la communication managériale.  En effet, devant un message inquiet d’un collaborateur, un manager pourra réagir de différentes façons en fonction de son attitude pour la personne et le message émis :

 

Un collaborateur dit :

« Je me demande comment nous allons faire pour gérer la masse de commandes avec l’installation du nouveau logiciel. Nous n’arriverons pas à gérer cette situation et il aurait peut-être été préférable d’engager plutôt que de changer le programme… »

La déclaration du collaborateur dénote une attitude négative teintée d’inquiétude qui s’est construite à travers plusieurs filtres perceptifs : il sait qu’un projet va avoir lieu et que celui-ci sera difficilement compatible avec ses tâches (filtre cognitif) ce qui engendre en lui de l’inquiétude (filtre affectif) et une démotivation se concrétisant à travers une plainte (filtre comportemental).

La réponse que peut apporter le manager sera plus ou moins efficace en fonction de sa propre attitude qui permettra ou non de faire évoluer le collaborateur sur les différents filtres perceptifs qui ont engendré son inquiétude.

 

  • Attitude apathique du manager

Le manager répond :

« Comme vous ne comprenez pas, je vous réexplique le déroulement du plan établi par la direction. En premier lieu nous prévoyons de faire ça, en deuxième lieu nous réaliserons ça, et enfin, nous conclurons par ça.»

Ce que le collaborateur pensera probablement
« Il m’a écouté » « Il m’a compris » « Il m’a aidé à évoluer »
Non Non Non

 

La communication est inefficace car elle ignore totalement  l’émotion de crainte du collaborateur. La réponse se borne à un discours technique et rationnel qui ne considère par l’interlocuteur comme un être psychologique.

 

Filtre cognitif : le manager connait parfaitement les aspects techniques de son projet mais n’envisage
pas les émotions que celui-ci peut susciter chez ses collaborateurs.

Filtre affectif : le manager ne perçoit et ne partage pas l’émotion de crainte vécue par son collaborateur.

Filtre comportemental : le manager n’est pas disposé à donner de l’importance à l’inquiétude de son collaborateur.

 

  • Attitude antipathique du manager

Le manager répond :

 

« Arrêtez cela. Vous n’avez aucune raison d’être inquiet. Vous savez bien que l’on a bien réfléchi à la question. Tout ira bien à condition que les équipes suivent ! »

Ce que le collaborateur pensera probablement
« Il m’a écouté » « Il m’a compris » « Il m’a aidé à évoluer »
Oui Non Non

La communication est inefficace car si l’émotion est bien comprise elle est toutefois rejetée sèchement. La réponse engendrera chez le collaborateur la frustration de ne pas avoir être compris.

 

Filtre cognitif : le manager connait parfaitement les aspects techniques de son projet. Il est conscient que celui-ci suscite des émotions mais estime qu’elles sont injustifiées.

Filtre affectif : le manager ne vit pas la même émotion de crainte vécue par son collaborateur et refuse de la partager.

Filtre comportemental : le manager n’est pas disposé à accepter l’inquiétude de son collaborateur.

 

  • Attitude sympathique du manager

Le manager répond :

 

« Je vous comprends bien. Je suis moi-même inquiet par cette situation. »

 

Ce que le collaborateur pensera probablement
« Il m’a écouté » « Il m’a compris » « Il m’a aidé à évoluer »
Oui Oui Non

 

La communication est inefficace car, bien que les émotions et le raisonnement aient été compris et partagés, l’attitude sympathique n’est pas une réponse managériale due au fait qu’elle fige le collaborateur dans son inquiétude et ne lui permet pas d’évoluer.

 

Filtre cognitif : le manager comprend les émotions que le projet peut susciter chez ses collaborateurs.

Filtre affectif : le manager ressent la même émotion de crainte que son collaborateur et n’hésite pas à la partager sans réserve.

Filtre comportemental : le manager est disposé à rassurer son collaborateur en ayant l’intention de partager ses propres émotions. Il n’envisage pas de répondre dans une perspective constructive.

 

  • Attitude empathique du manager

Le manager répond :

 

« Je vois que ce changement vous inquiète et c’est compréhensible. Laissez-moi pourtant vous  expliquez pourquoi je perçois les choses autrement »

 

Ce que le collaborateur pensera probablement
« Il m’a écouté » « Il m’a compris » « Il m’a aidé à évoluer »
Oui Oui Oui

La communication est efficace car le manager comprend parfaitement l’émotion de l’autre et l’accepte même si il ne la partage pas. Dans ce schéma de réponse, le manager réussit à répondre à tous les éléments de la perception négative du collaborateur.

 

Filtre cognitif : le manager comprend les émotions que le projet suscite chez son collaborateur.

Filtre affectif : s’il a pu se mettre à la place de son collaborateur, le manager ne partage néanmoins pas l’émotion de crainte vécue par son collaborateur.

Filtre comportemental : pour lever la crainte de son collaborateur, le manager à l’intention de lui expliquer pourquoi il ne partage pas la même émotion même si il est capable de la comprendre.

 

L’empathie dans une dynamique collective

Nous avons illustré, ici, l’utilisation de l’empathie dans le cadre d’une relation un-à-un. Or, c’est la composante essentielle dans tout travail collaboratif au sein d’un groupe de travail. Qu’il s’agisse de réfléchir ou de décider ensemble, la gestion et la compréhension des  trois composantes est absolument essentielle pour développer un climat de confiance [2] et ainsi développer l’efficacité du groupe. Un manager s’engageant dans cette démarche se posera certainement les questions suivantes : Est-ce que chacun des collaborateurs autour de la table est en mesure d’écouter l’autre, de comprendre l’autre, de soutenir l’autre ? Suis-je capable, en tant que responsable, de travailler sur les trois filtres perceptifs constituant les attitudes de mes collaborateurs ? Comment aider mes collaborateurs à développer leur empathie pour améliorer les capacités de fonctionnement de mon groupe ?

Enfin, l’empathie dépend souvent de nos connaissances et de nos sensibilités personnelles. Vouloir développer l’empathie dans ses relations collégiales c’est avant tout prendre conscience de la réalité des autres. Dès lors, l’écoute active, le respect et l’ouverture d’esprit peuvent toujours s’avérer utiles pour s’engager sur la voie de l’empathie…

 

Christel Christophe et Lionel Barets, le 7 août 2013

 

 

 

[1] Proposées par Patrick Légeron dans son ouvrage « Le stress au travail » (p. 266, 2001, Odile Jacob) offrant notamment une grille d’analyse sur la gestion managériale des émotions à partir de laquelle cet article est inspiré.

[2] Référence à l’article « La confiance, une glue sociale indispensable pour développer l’efficacité ! »

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